Tas II

Composé de 176 pages, Tas II est divisé en deux parties, construites en contrepoint l’une de l’autre.

La première partie, intitulée À cherche, est constituée principalement de fragments. Exercices du phrasé où l’écriture cherche sa langue et sa syntaxe, ces instantanés résultent d’un double mouvement, de soustraction et d’addition. Toutefois, l’apparence discontinue du texte découvre une continuité sous-jacente, pour laquelle la poétique du photogramme, exposée dans cette première partie, pourrait servir de commentaire structurel, sinon de théorie. À cherche est l’acte de cette théorie. « Ce qui précisément éloigne toujours l’auteur de l’accomplissement de son sujet, c’est que cherchant à élaguer l’idée de ses ramifications sans cesse renaissantes, à la réduire au simple, il veut aussi parcourir les possibles inexplorés. » (Jean-Pierre Martin, cité dans . TAS . p. 198)

La seconde partie, Autres pierres-de-tête, fait transition avec la forme du Tas telle que nous la connaissons actuellement. A s’inscrire dans les marges de la première partie, qu’elle multiplie et réfracte, Autres pierres-de-tête pourrait à son tour recevoir la définition suivante : « Chaque texte apparaît comme le fascicule ou l’opuscule d’un corps de l’œuvre qui se construit sur la mémoire de ses propres écrits, qui est à lui-même sa propre fondation, ne cesse de se réfléchir, de renvoyer à ces propres arcanes. » (Idem, . TAS . p. 198) Aussi bien cette seconde partie annonce-t-elle l’inscription progressive de la lecture dans l’écriture, telle que la mettra en scène, en particulier, Tas IV.

Dans le battement entre intro- et extra-réalisme (. TAS . p. 198), entre le but de cette recherche et sa théorie, l’écriture et sa réflexion dans la lecture, Tas II trouve donc sa consistance textuelle. Mais la question du sens, qui court tout au long de Tas II, fait plus spécifiquement l’originalité de ce livre ; et de ce volume une pièce essentielle du dispositif d’écriture.

S’y démontre comment cet effet de surréflexion est inséparable d’une méditation sur le sens, sur ses paliers et son inachèvement. C’est que l’appréhension du rien (mobile dont on s’apercevra peut-être qu’il se trouve supplanté, au fur et à mesure de l’expérience d’écrire, par les valeurs de l’empêchement, ou de l’impasse au sens fort que lui confère Patrice Loraux) – l’appréhension du rien est ici, aux antipodes de toute forme de nihilisme, un principe dynamique : il induit le sens, en effet jamais fixé, toujours à interroger, du parcours que décrira l’écriture. Par le nouage du rien et du sens, dans Tas II, s’inaugure une inspection des vertus du langage et de la logique, fondatrice de l’expérience d’écriture intitulée Tas.